samedi 27 mars 2010

Indépendance, pourquoi en parler encore?

Voici l'ébauche d'un texte sur notre très québécoise question de l'indépendance.
L'Engagé était trop jeune pour voter en 95 et il croit sincèrement que beaucoup des problèmes que nous éprouvons proviennent de notre incapacité d'agir.

En effet, vivre c'est agir. Si l'on accepte ce postulat, on doit alors comprendre que la pérennité de la collectivité québécoise, du français en Amérique dépend des capacités d'agir de nos société.
L'incapacité de mener à termes certains projets (d'ailleurs pas toujours bons) est symptomatique des limites que nous nous imposons. Vous aurez compris que je m'intéresse à l'éducation et à l'environnement ; il nous manque quelques milliards à investir dans ces deux ministères (et dans des projets de la société civile), les avons-nous?

L’Allemagne est un grand pays et un modèle de tolérance et de démocratie. Le Danemark s’empresse-t-il d’y entrer? Les Danois sont 5,3 millions, les Allemands, autour de 80 millions.

Ça serait un suicide pour la nation danoise qui deviendrait une minorité politique, économique et culturelle, dans un ensemble politique où ses intérêts ne seraient plus ceux de la majorité. Les qualités du Canada n’en font pas un pays dont la structure politique est favorable à l’autorité politique nécessaire à la pérennité d’une collectivité québécoise dans une Amérique anglophone et dans un monde fortement commercial, postmoderne et américanisé. C’est cette logique qui prévaut dans notre recherche d’indépendance. Si les Canadiens voient cela comme une séparation, c’est pour les Québécois qui choisissent cette option l’occasion d’exercer une maitrises sur les instruments politiques (et ensuite culturels, économique, sociaux, légaux et linguistiques) nécessaires à une résolution personnelle (et non anglo-saxonne et multiculturelle) aux défis qui nous sont posés.

Si individuellement, certains Québécois peuvent profiter du Canada pour étendre leur influence, le poids démographique et la tendance rigide des institutions canadiennes empêche une telle influence de la part de la collectivité québécoise en son ensemble. Nous sommes une minorité. sur un gros territoire. L’enjeu, c’est de devenir une majorité dans un nouveau territoire.

Quand on parle de résistance, c’est celle de David contre Goliath ou des Gaulois contre les Romains si vous préférez la B.D. à la bible. On résiste à une Louisinisation de notre société, tout simplement.

Ce qui est honteux et favorable au statu quo, donc à une souscription d’une perte d’influence structurelle du Québec, c’est de croire que la confédération puisse marcher dans le sens des intérêt du Québec alors que le Canada est dirigé par une nation différente de la minorité Québécoise, l’histoire du Québec montre que tout progrès pour la société québécoise exige toujours des batailles et des énergies gaspillées.

Même si nous joignions nos voix et nos députés aux partis fédéraux, nous demeurons en minorité dans ces derniers, nous sommes toujours assujettis à un pacte qui nous est simplement défavorable.

L’indépendance est une option beaucoup plus susceptible de nous donner le contrôle des leviers de notre développement. Même si on reçoit de la péréquation (8 milliards) et des transferts (6 milliards ), la balance fiscale est défavorable pour des Québécois qui veulent faire les choses différemment des autres Canadiens. N’oublions pas, le budget (2009-2010) de la province est de 69 milliards alors qu’elle a la charge des ministères les plus couteux et le budget fédéral est de 283 milliards (lequel inclut les transferts, certes, mais le peu de services qu’Ottawa dispense aux citoyens, en comparaison des provinces, montre qu’il est un véritable gouffre financier.

Comme les politiciens franco-québécois au pouvoir à Ottawa nuisent plus qu’ils n’apportent au Québec (Trudeau, Chrétien), que ceux qui essaient échouent (Mulroney), devant un gouvernement fédéral à forte couleur régionale, les Québécois ont peut-être de bonne raison de préférer le bloc. Enfin, le Bloc ne s’est pas opposé à la coalition NPD-LIBÉRAUX, et c’est précisément ce soutien qui aurait torpillé l’entente. Cela étant dit, la hargne exprimée contre les ‘’séparatiss” a bien montré qu’ils ne sont pas les bienvenus au Pays. Or, pas un politicien, québécois ou autre, n’offre de solution fédérale au statu quo. Comme ce dernier est préjudiciable au Québec, aussi bien avoir une représentation qui en rend compte, il est donc difficile d'être contre le Bloc... Si nous devions accéder à l'Indépendance à moyen terme, nous aurions alors la preuve de sa raison d'être.

La perception canadienne

Si l’on est structurellement minoritaire et que l’on tient à avoir des politiques différentes, précisément pour permettre l’épanouissement d’un peuple qui a une culture, une langue et un droit différents du peuple majoritaire, s’il n’y a pas moyen de rénover les structures administratives et politiques par lesquelles cette minorité pourrait avoir plus d’autonomie (et les moyens de la réaliser), on sera donc perpétuellement perçu comme «chialeur».

Mais cette société, est-ce qu’elle est «chialeuse» parce que ses plaintes sont légitimes et qu’elles ne sont pas entendues ou parce qu’elle demande la lune? Depuis Duplessis (bien avant en fait, mais on se réfèrera ici à une période contemporaine pour éviter un trop long roman), nous avons des prétentions autonomistes. Contrairement aux autres provinces, ne demandons pas à Ottawa d’agir pour nous pour régler nos problèmes, nous cherchons au contraire à nous administrer d’une manière originale. Toutefois, Ottawa s’autorise un pouvoir de taxation plus grand que ses besoins. Par ailleurs, la tendance de chaque bureaucratie est de s’accroitre, Ottawa, dont le caractère centralisateur est bien connu n’échappe pas à cette règle. C’est pourquoi nous ne pouvons régler tous nos problèmes au cas par cas : la tendance canadienne à vouloir des solutions fédérales d’un océan à l’autre vient heurter la volonté québécoise d’offrir ses propres services. Pourquoi sommes-nous si entêtés? Parce que c’est la seule façon de garantir un certain épanouissement pour notre collectivité, notre culture, notre langue. Nous avons une identité particulière, nos politiques, notre droit doivent la refléter. La tendance d’Ottawa à centraliser, son pouvoir d’interférer dans les champs politiques, sa gourmandise fiscale et son pouvoir de dépenser heurtent le désir québécois d’agir de manière autonome pour développer notre société à notre façon.

Cette tension est tributaire de la structure du système, on peut régler les problèmes ponctuels, mais le problème qui institue la grogne en système se situe précisément en amont, il faut le corriger en amont. En dehors du parti Égalité, aucun parti moderne du Québec n’a nié le déséquilibre entre notre les aspirations du Québec et l’appétit d’Ottawa.

Voilà pourquoi la réponse se situe sur le plan constitutionnel.
Meech, c’était les conditions minimales pour que le Québec réintègre la confédération « dans l’honneur et l’enthousiasme », ces mots sont d’un fédéraliste convaincu : Robert Bourassa.

Meech a été torpillé. Il a suffi pour ça que le Manitoba et Terre-Neuve s’y opposent (par le biais d’ailleurs d’un processus assez peu légitime pour cautionner Meech : le Manitoba devait voir son assemblée l’accepter à l’unanimité, alors que Clyde Wells rescinde sa signature). Deux provinces, qui ne représentaient que 1,6 million de Canadiens ont suffi pour réduire à néant les efforts pour permettre au Québec de disposer de la structure qui aurait rendu le «chialage» caduc.

Les «séparatiss» (si vous voulez), les indépendantistes (ce que je préfère) se fondent sur cet événement pour faire la démonstration que le Canada n’est pas réformable : 5 % de la population du Canada a suffi pour bloquer une entente qui aurait pourtant pu nous satisfaire, c’était trop nous donner. Dans l’absolu, l’Ile du Prince Édouard a constitutionnellement le même pouvoir que le Québec avec une population de 141 000 personnes, soit 0,4% de la population du Canada.

Dans l’absolu, la solution qui conviendrait à une majorité de Québécois semble être de donner, à l’intérieur du Canada, plus de pouvoir au Québec. Mais comme je viens de l’écrire, le reste du Canada refuse cette possibilité (Charlottetown a montré la même chose que Meech), alors le constat simple et brutal, c’est que pour changer la situation du Québec, il faut changer toute celle du Canada; la réponse du Canada est qu’il ne veut pas changer. Par ailleurs, après le référendum de 1995, malgré les promesses (encore) de réformes, le ton s’est encore durci. Voilà pourquoi je prétends qu’il n’est pas réformable, c’est un dialogue de sourds.

L’ennui c’est que plus le temps passe, plus nous nous affaiblissons au sein de ce pays : notre poids démographique ne cesse de diminuer, notre influence politique également. Enfin, nous sommes dans une situation unique : la langue et la culture de la majorité avec laquelle nous avons un problème de partage des pouvoirs est la langue même du commerce international, des affaires et de la culture de masse. Pis, c’est la langue de la minorité dans notre propre province et enfin, cette confusion, ce bilinguisme au niveau fédéral, dans une Amérique anglaise, fait de l’anglais une langue non seulement plus attirante pour le nouvel arrivant qui s’installe à Montréal, mais il peut en plus gagner sa vie dans la métropole sans devoir maitriser le français. Ce cocktail est préjudiciable à l’épanouissement de la société québécoise, c’est pourquoi le statu quo est inacceptable.

Ne pas prendre position, être «contre la chicane», préserver le statu quo, c’est accepter une lente dégradation de notre condition et une marginalisation de notre société. À terme, nous rejoindrons le destin des autres collectivités francophones d’Amérique : un déclin tranquille.

Voilà pourquoi l’indépendance, la souveraineté ou la séparation est préférable. On «sépare peut-être le Canada, on se « sépare » peut-être, mais on gagne la liberté et la possibilité de nous développer pleinement selon nos choix et pas selon la contingence et les moyens d’une province. On gagne de nouveaux pouvoirs, de nouvelles expertises et de nouveaux champs (en ayant une voix à l’international) pour faire valoir nos intérêts.

On gère déjà ce qui est le plus compliqué et qui coute le plus cher dans les autres pays; nos programmes sont souvent imités et considérés comme novateurs.

J’ai le plus grand respect pour l’initiative de Bourassa ou Mulroney pour avoir au moins essayé, j’ai affirmé que si le Canada pouvait augmenter le succès d’un individu, comme Trudeau, ce n’était pas vrai sur le plan collectif.

Quant au bilinguisme, la seule province officiellement bilingue est le Nouveau-Brunswick, le Québec est, on le sait bilingue, officieusement : on peut avoir des services provinciaux, municipaux et commerciaux dans les deux langues et la minorité anglophone est tout sauf opprimée : un petit tour à Wesmount, sur le campus McGill, à Ville Saint-Laurent et Pointe-Claire vous convaincra. D’ailleurs, l’anglais se porte de mieux en mieux dans Outremont, Rosemont-La-Petite-Patrie, le Mile-End et le Plateau. L’administration politique fédérale est bilingue : n’allez pas me faire avaler que c’est le pays qui l’est, les autres provinces sont officiellement anglaise (de jure ou de fait)

Quant à la péréquation, c’est un programme particulier et nous pourrions un jour avoir à en payer : l’Alberta vient d’ailleurs de diminuer les redevances qu’elle exige pour l’extraction des sables bitumineux afin d’éviter de continuer à la financer. Mais il serait préférable que Québec récupère cet argent directement en points d’impôts et en taxes au lieu de recevoir indirectement ce qu’Ottawa perçoit. Comme je vous l’ai déjà écrit le budget fédéral c’est 283 milliards, le budget provincial, c’est 69 milliards, pourtant, on a le ministère de la Santé et de l’Éducation. On pourrait, avec notre fonction publique, facilement offrir les services qu’Ottawa dispense, et on n’aurait pas à payer le poids de deux administrations, et c’est certain que l’on envoie plus à Ottawa que ce 14 milliards qu’il nous retourne : les revenus autonomes de la province sont de l’ordre de 46 milliards. On doit certainement envoyer le tiers de cette somme à Ottawa; les taux d’imposition sont assez similaires (au Québec) entre le provincial et le fédéral.
Essayons pour voir : notre population est 23% de celle du Canada, en supposant que l’on soit des B.S et que l’on ne contribue qu’à 15% des 224 milliards de recettes du Canada, c’est encore 33,6 milliards que l’on envoie à Ottawa. Ça veut dire qu’en dehors des 14 milliards que l’on reçoit ( en péréquation et transferts) les services qu’Ottawa offre à la province et à ses citoyens coutent 19, milliards!

C’est une estimation, mais cela vous donne une idée. Notre ministère le plus couteux au Québec, c’est la santé et les services sociaux : 25 milliards. Ensuite, c’est l’éducation avec 14 milliards. Les autres ministères ne nous coutent ensemble que 18 milliards. Je pense donc que nous pourrions faire beaucoup avec les milliards que nous envoyons à Ottawa, nous avons déjà une fonction publique moins couteuse (les salaires sont inférieurs au Québec) et n’oublions pas les économies d’échelle. Alors quand on nous traite de B.S., je tique un peu. Ce qui est B.S., c’est le rendement du Fédéral. Aucune province n’offre autant de service et de ne les développe d’une manière aussi original que le Québec, à tel point que les jeunes anglophones de partout au Canada fuient la gentrification de leurs villes et viennent profiter de la qualité de vie qu’ils ne peuvent plus se payer dans leur province d’origine.

Enfin, parmi les 5 provinces B.S. qui touchent la péréquation le Québec est a deuxième province qui en touche le moins population, ainsi si l’on divise ce que reçoit chaque province selon son poids démographique en pourcentage, de manière à voir ce que coute chaque 1% de la population canadienne selon qu’elle est dans différentes provinces, c’est le Nouveau-Brunswick qui gagne, avec un cout de 700 millions pour ce 1%, ensuite, le Manitoba avec 504 millions, la Nouvelle-Écosse est troisième avec 410 millions et au Québec, ce même 1% coute 360 millions. L’Ontario en reçoit des miettes. Donc même si l’on reçoit 8 milliards, ça ne fait pas de nous les B.S. Par contre, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse ne financent pas à la même hauteur que la population du Québec le gouvernement fédéral. Comme ce dernier offre plus de services dans ces provinces qu’il ne le fait au Québec, mais comme le Québec doit aussi financer une part de l’État dont les autres provinces plus petites bénéficient, il est tout à fait mesquin de calculer ce que le Québec gagne en observant les transferts fédéraux. Il ne faut pas perdre de vue que le fédéral coute ( selon une estimation d’une contribution à hauteur
de 13% des revenus autonomes du fédéral) facilement 19 milliards aux Québécois, pour des programmes que nous gèrerions sans doute mieux.

En somme, on ne peut pas être pour le statu quo et prétendre vouloir le bien de la collectivité québécoise, la situation actuelle est toxique pour le Québec parce que fiscalement Ottawa empêche Québec d’assurer correctement la charge de ses compétences et parce que politiquement, le Québec n’est libre que dans l’exercice de certaines compétence. Son assujettissement au pacte fédéral l’empêche d’agir, de se développer , de prendre des risques, d’accumuler de l’expérience, d’apprendre. Toutes ses initiatives sont prises dans le grand soluté de l’administration canadienne, ce qui dilue notre rapport direct avec le reste du monde.

Vivre c’est agir; si on n’agit pas, on meurt à petit feu. Chaque fois que la société québécoise est remplacée par Ottawa, elle perd une occasion de croitre.



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